Mardi 8 octobre 2024. Le mardi est l’unique jour de la semaine que Georges passe au bureau, je crois. Il arrive très tôt, vers 6h. Il est seul. L’agent de sécurité referme le parking derrière lui. Les autres employés n’arriveront qu’à 8h45. 6h, c’est l’heure où les bureaux sont à peine éclairés. L’heure des équipes de nettoyage.
De mon côté, j’arrive à 5h40 comme chaque mardi. Je gare ma Mobylette rouge à l’emplacement réservé aux prestataires. Je récupère la mallette sanglée sur mon porte bagage. Je passe mon badge au portillon d’entrée en saluant Max, l’agent de sécurité sexagénaire qui assure la tranche 5-9h. Je me rends au local ménage et je me change : j’enfile ma blouse bleue à pressions, mes gants Mapa roses et le foulard en soie qui tient mes cheveux en arrière. Je remplis un seau d’eau, prends l’un des chariots de ménage équipé d’un aspirateur et de sacs poubelles. Je place ma mallette sur le chariot et sors en direction des ascenseurs.
Seules les lumières secondaires sont éclairées. Dehors, le jour se lève, timidement. Je traverse le RDC dans un silence ouaté. Routine du mardi.
Je rebadge au niveau des ascenseurs, pour accéder au dernier étage. L’étage du big boss où la moquette, de couleur claire, est épaisse et douce. De larges baies vitrées offrent au regard les plus beaux levés de soleil de Dallas. J’aime cette ascension vers les cieux ; mes sens s’éveillent. Dans 2h je quitterai les lieux, des étoiles plein les yeux et un sourire aux lèvres que personne ne remarquera car qui remarque une simple femme de ménage ?
(Ting) Je suis arrivée. La cloche de l’ascenseur me sort de mes pensées.
Je pousse le chariot vers le renfoncement du couloir, sur la gauche. Je retire mes sabots en plastique, mon pantalon, mes gants Mapa. Je garde le foulard et la blouse. En dessous, une petite culotte en coton de gentille fille et rien d’autre. J’avance à pas feutrés sur cette moquette moelleuse que je connais par coeur. Mon coeur s’accélère en passant devant les baies vitrées sans store ; et si on me voyait. La porte du bureau de Georges est ouverte. Il est assis sur son fauteuil en cuir, dos à la porte. Je m’approche, frôle son cou. Je défais mon foulard pour l’attacher en bandeau, sur ses yeux. Il frémit d’excitation.
Je retourne le fauteuil face à moi. Les mains de Georges trouvent leurs chemins le long de mes jambes et sous ma blouse. Dans un souffle, il me murmure : “tu les as ?” “oui Georges, dans la poche droite”. Il tâtonne, trouve la poche et sort la paire de menottes en fourrure duveteuse rouge. Il sourit. Le jeu peut commencer.